Le terme de "comptabilité carbone" (carbon accounting) désigne de façon très large les méthodes utilisées afin d'intégrer la question du changement climatique dans la stratégie et les politiques RSE des entreprises. La comptabilité carbone est très souvent employée afin de décrire plus précisément l'ensemble des méthodes utilisées pour dénombrer, quantifier et classer les émissions de gaz à effet de serre (GES) d'une entreprise, d'une collectivité, d'une association sur un périmètre donné.
La comptabilité carbone permet donc pour une entreprise d'évaluer les émissions de gaz à effet de serre engendrées par son activité et celle de sa chaîne de valeur et donc d'évaluer sa dépendance au carbone.
Il est possible toutefois de distinguer deux types de comptabilité carbone : la comptabilité carbone générale et la comptabilité carbone analytique.
La première, la générale, offre une vision générale des émissions de GES et peut répondre aux exigences réglementaires auxquelles sont soumises les entreprises. La seconde, l'analytique, permet d'entrer dans le détail des émissions, poste par poste, entité par entité, filiale par filiales, afin de construire derrière un plan d'action ciblé et efficace.
1. Comptabilité carbone et comptabilité financière
On parle de comptabilité carbone car elle se rapproche beaucoup de la comptabilité financière, avec des normes, une méthodologie, des données à collecter puis à communiquer. À l'image de la comptabilité financière avec le Plan comptable général, Sami est à l'origine du Plan carbone général, désormais piloté par l'association pour la transition bas-carbone (ABC), un guide opératoire de mise en application des cadres de la comptabilité carbone qui fait aujourd'hui référence.
Et comme dans la comptabilité financière, on peut distinguer la comptabilité carbone générale de la comptabilité carbone analytique.
2. Qu’est ce que la comptabilité carbone générale ?
La comptabilité carbone générale donne une vue générale de la dépendance au carbone de l'entité analysée (entreprise ou collectivité par exemple).
Elle cherche ainsi à mesurer les émissions de GES d'une entité afin ensuite de pouvoir les réduire et de répondre au problème majeur du réchauffement climatique. C'est ce que l'on appelle communément un bilan GES.
À cet effet, plusieurs outils ou méthodologies de comptabilité carbone ont été élaborés au niveau national ou international. Voici les plus répandus : le Bilan Carbone® (développé initialement par le gouvernement français et l'Ademe, lancé en 2004, désormais porté par l'ABC), le BEGES réglementaire et au niveau international le GHG Protocol et la norme ISO 14069.
Un bilan GES permet d'enregistrer chaque flux entrant et sortant de carbone puis de les classer par scopes (scopes 1, 2 et 3), par catégories et par postes d'émissions selon la nomenclature. Par exemple, il y a 6 catégories et 22 postes d'émissions dans la méthodologie réglementaire française actuelle et 23 postes d'émissions dans la méthodologie Bilan Carbone®.

La comptabilité carbone générale, via le bilan GES, remplit ainsi plusieurs objectifs, avec deux visées distinctes.
- Visée externe
Un bilan GES peut être un outil de reporting réglementaire. Il permet de communiquer les émissions de gaz à effet de serre engendrées par les activités de l'entreprise et par sa chaîne de valeur et peut ainsi répondre aux réglementations françaises et européennes de plus en plus ambitieuses.
En France, un BEGES (Bilan d'Émissions de Gaz à Effet de Serre) est obligatoire tous les 4 ans pour les entreprises de plus de 500 salariés et tous les 3 ans pour les collectivités de plus de 50 000 habitants et les personnes morales de droit public employant plus de 250 personnes (hôpitaux, établissements publics…).
Cette obligation réglementaire va bientôt s'étendre à de nouvelles entreprises. La nouvelle directive européenne de reporting extra-financier, la CSRD, prévoit ainsi un reporting sur les émissions de gaz à effet de serre pour les entreprises de plus de 250 salariés.
Important : Il n'est pas obligatoire de réaliser un Bilan Carbone® pour répondre à ces obligations réglementaires, même si cette méthode le permet parfaitement.
Par ailleurs, au-delà des enjeux réglementaires, la comptabilité carbone générale permet aussi un reporting auprès des parties prenantes. De plus en plus d'entreprises demandent ainsi à leurs fournisseurs de fournir leur bilan GES ou intègrent dans leurs appels d'offres le critère de l'empreinte carbone.
- Visée interne
Le bilan GES comme outil de reporting n'est pas qu'utile en externe, il l'est aussi en interne.
Pourquoi ? Parce qu'il permet d'avoir une vision globale des émissions de gaz à effet de serre de l'entreprise et de sa chaîne de valeur. En réalité, le bilan GES montre à l'entreprise son degré de dépendance au carbone. Et dans un monde où la contrainte carbone est et va devenir de plus en plus forte, cette information est essentielle.
Grâce à la comptabilité carbone générale, l'entreprise dispose d'outils pour analyser les risques financiers liés à la transition bas-carbone auxquels elle est exposée.
Et puis, la comptabilité carbone générale est le point de départ de toute stratégie climat d'une entreprise. Un bilan GES permet en effet d'identifier les principaux postes d'émissions de l'entreprise et de construire un plan d'action de réduction. Un Bilan Carbone® Initial permet parfaitement de mettre en place un plan de transition efficace, car l'intérêt de cette démarche n'est pas de remplir des postes d'émissions, mais bien de les analyser avec finesse pour passer à l'action.
Néanmoins, pour certaines organisations ayant des besoins d'analyse très poussés, la comptabilité carbone analytique peut apporter un niveau de détail supplémentaire.
3. La comptabilité carbone analytique
Là où la comptabilité carbone générale offre une vision générale de la dépendance au carbone, la comptabilité carbone analytique, telle que définie dans la méthode de Comptabilité carbone analytique mise à disposition par l'ABC, permet une vision détaillée de chaque poste d'émissions, par produits, par fournisseurs, par site ou encore par filiale.
Précisons tout de suite que la comptabilité carbone analytique est une sous-partie de la comptabilité carbone générale. Autrement dit, il n'y a d'approche analytique que s'il y a eu auparavant une approche générale. On part du bilan GES global pour ensuite entrer dans le détail.
Cette approche analytique permet un niveau de détail très poussé pour des organisations ayant des besoins spécifiques d'analyse fine. L'objectif ici, c'est de pouvoir, en interne, détailler finement les sources d'émissions : postes par postes, sites par sites, filiales par filiales, etc.
L'enjeu, c'est d'avoir une compréhension très détaillée de la source de ses émissions et ainsi de pouvoir construire derrière un plan d'action extrêmement ciblé.
Important : La comptabilité carbone analytique n'exclut pas la possibilité de réaliser un reporting réglementaire. Elle peut également servir à des fins de reporting externe tout en offrant le niveau de détail souhaité en interne.
Le niveau de détail peut être très poussé. Mais pour cela, il faut catégoriser les activités de l'entreprise et donc les données collectées lors de la réalisation du bilan GES selon la méthode de Comptabilité carbone analytique. Comment définir cette catégorisation ? Deux éléments sont importants :
- La structure de l'entreprise : est-ce qu'elle dispose de plusieurs sites ? De plusieurs filiales ? Plusieurs pays où elle est présente ? L'objectif, c'est d'organiser sa comptabilité carbone selon cette structure.
- La gouvernance de l'entreprise : est-ce qu'il y a un responsable pour chaque site ? Pour chaque filiale ? Qui pilote le sujet de la stratégie climat ? Ces éléments permettent également de structurer en amont la catégorisation des émissions.
La comptabilité carbone analytique et sa nomenclature sont propres à chaque entreprise selon la méthode définie par l'ABC. Cela dépend de sa structure, de sa gouvernance mais aussi de son secteur d'activité. Quelques exemples :
- Dans le secteur tertiaire : les bilans GES de ces entreprises révèlent souvent une prépondérance des émissions issues des achats de services, des déplacements des collaborateurs, de la construction et de l'exploitation des locaux. La catégorisation doit donc être priorisée sur ces émissions.
- Dans le secteur textile : la majorité des émissions d'une entreprise de ce secteur provient des matières premières et de la fabrication des produits. La catégorisation devra donc être fine sur l'origine des matières premières, sur les fournisseurs, les procédés de fabrication.
- Dans le secteur industriel : les émissions du scope 1 et 2 sont plus importantes que dans les autres secteurs. Il sera utile de pousser l'analyse sur les consommations d'énergie, par usines ou par produits selon les fournisseurs ou les matières premières.
4. Exemple pratique
Prenons l'exemple d'une entreprise pour laquelle nous avons réalisé son bilan GES 2022.
Prenons l’exemple (anonymisé) d’une entreprise pour laquelle nous avons réalisé son bilan carbone 2022.
Comptabilité carbone générale
Cette approche permet aux entreprises de répondre parfaitement aux enjeux réglementaires via ce reporting complet et précis des émissions, tout en constituant une base solide pour l'élaboration d'un plan d'action de réduction.
Voici le résumé de ses émissions.

Et le résumé des émissions, poste par poste.

Comptabilité carbone analytique
Entrons maintenant dans l'analyse plus poussée des émissions selon la méthode de Comptabilité carbone analytique. Cette approche permet d'avoir une vision par collaborateur et selon les sites de l'entreprise, offrant un niveau de granularité très élevé pour cibler précisément les actions de réduction.

Ce graphique nous permet d’analyser l’intensité carbone par collaborateur et par site et nous donne des premières informations intéressantes. L’intensité carbone est ainsi près de 3 fois plus élevée sur les sites du Havre et de Pierrelatte qu’à St-Cloud, plus de 2,5 fois plus élevé à Lyon qu’à St-Cloud. Pour réduire rapidement et efficacement les émissions, le plan d’actions se concentrera donc en priorité sur ces sites. Par ailleurs, autre élément intéressant : bien que les déplacements représentent le poste d’émissions le plus important sur tous les sites à part de celui de St-Cloud, les locaux apparaissent également comme une source importante sur les sites de Pierrelatte et de Dunkerque. Ce qui permet là encore à l’entreprise de cibler les mesures visant à réduire les émissions issues des locaux en priorité sur ces deux sites.
Et il est possible d’entrer encore plus dans les détails. Sur les déplacements par exemple, le 1er graphique de la répartition globale des émissions nous apprend qu’il s’agit du premier poste d’émissions à l’échelle de l’entreprise avec 36% des émissions totales. C’est une première information mais l’approche analytique va nous permettre d’aller plus loin.
Ainsi, on peut d’abord déterminer l’intensité collaborateur sur ce poste d’émissions et par site de l’entreprise.

L’intensité carbone/collaborateur pour les déplacements est ainsi très élevée sur les sites du Havre et de Lyon. Et dans une moindre mesure sur ceux de Cherbourg, de Pierrelatte et de Dunkerque. Ce qui justifiera des actions ciblées sur la mobilité des collaborateurs sur ces sites spécifiques. Et on peut encore zoomer sur ce poste des déplacements.

Autre exemple de zoom sur un poste d’émissions en particulier : les locaux. Dans le 1er graphique, les émissions liées aux locaux étaient importantes à Pierrelatte et à Dunkerque. En entrant dans le détail, on se rend compte que c’est lié à la construction récente d’un bâtiment à Dunkerque mais que c’est l’exploitation du site qui pose problème à Pierrelatte.

Cette granularité sur les émissions par site et par collaborateur peut se retrouver dans d'autres entreprises par filiale, par entité, par produit, par fournisseur, etc., selon les besoins spécifiques de l'organisation.
5. Sami, précurseur de la comptabilité analytique
Depuis le lancement de notre plateforme en 2020, nous misons sur une vision du bilan GES comme outil essentiel à la stratégie climat de l'entreprise. Et c'est pour cela que nous avons développé un logiciel permettant une approche analytique conforme aux principes de la méthode de Comptabilité carbone analytique.
Car pour disposer de cette comptabilité analytique, il faut d'abord pouvoir associer les bonnes données aux bonnes catégories d'émissions et au bon niveau de détail souhaité. Notre logiciel permet de créer pour l'entreprise sa propre nomenclature grâce à :
- Plus de 300 catégories d'émissions possibles afin de personnaliser et mieux catégoriser les émissions
- La création de "dimensions" et de "tags" afin d'associer précisément les émissions à la structure de répartition choisie par l'entreprise
- La création d'indicateurs d'analyse personnalisés
L'approche analytique permet donc d'orienter et de cibler votre plan d'action tout en étant un outil de suivi et de reporting de la stratégie climat.

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Conclusion
Il ne s'agit pas ici d'opposer comptabilité carbone générale et comptabilité carbone analytique. Ce n'est pas l'une ou l'autre, c'est les deux selon les besoins. Car elles sont complémentaires.
La comptabilité carbone générale permet de se mettre en conformité réglementaire, d'avoir une vision globale de ses émissions, de se comparer avec d'autres entreprises du même secteur, et surtout de construire un plan de réduction efficace. Un Bilan Carbone® Initial permet parfaitement de passer à l'action et de définir une stratégie de réduction ambitieuse.
Pour certaines organisations ayant des besoins d'analyse très poussés, la comptabilité carbone analytique, appliquée selon la méthode définie par l'ABC, devient un complément précieux. Car c'est elle qui va permettre à ces entreprises de comprendre avec une granularité très fine la structure de leurs émissions et ainsi permettre de construire un plan de réduction encore plus ciblé et détaillé.
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